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1990-2020 / Dans un nouveau rapport La LTDH décrit 30 ans de terreur et de résistance du peuple togolais

20 juillet 1990-20 juillet 2020. Il y a trente ans que la Ligue togolaise des droits de l’homme (LTDH) œuvre pour la promotion et la protection des droits de l’homme au Togo. 30 années d’un parcours de combattant dans un pays où la vie humaine n’a toujours pas de valeur aux yeux des gouvernants. Dans le cadre de la célébration de ce jubilé de perle, la LTDH a organisé une série d’activités dont un séminaire en ligne qui a eu lieu les 20 et 21 juillet 2020. Hier, elle a organisé une conférence de presse au cours de laquelle un rapport synthétique des 30 ans d’existence de l’organisation a été présenté. « Le martyr du peuple togolais à travers trente ans de terreur et de résistance (1990-2020) », tel est le titre du document dont nous vous présentons un extrait.

Le rapport est constitué de 4 parties essentielles. La première traite des droits fondamentaux et la liberté des libertés fondamentales. Il s’agit de la liberté d’expression et d’opinion, la liberté de presse, la liberté d’association, la liberté de circulation et la protection des femmes et des enfants ou mineurs.

Dans ce chapitre, la LTDH fait remarquer que dans tout Etat qui se veut démocratique, la liberté d’opinion et d’expression revêtent un caractère fondamental étant donné qu’elles ont une valeur constitutionnelle. Elles sont consacrées par l’article 25 de la Constitution togolaise. Malheureusement, la pratique vécue contraste avec le ton fort donné dans leur consécration constitutionnelle. « En effet, il convient de relever que les lois censées règlementer ces deux libertés fondamentales pour leur meilleure jouissance par les citoyens, ont limité ou restreint la révision du code pénal en 2015 qui érige en infraction l’outrage envers les représentants de l’autorité publique, la diffamation et l’incitation à commettre des crimes et délits. Ces infractions qui sont susceptibles d’être utilisées contre des personnes ayant une opinion dissidente, portent le germe de violation de la liberté d’expression. La preuve en est que, le 22 août 2018, Folly Satchivi , leader du mouvement, « En aucun cas » qui réclamait la limitation des mandats présidentiels, a été arrêté et inculpé pour trouble à l’ordre public pour avoir organisé une conférence non autorisée », relève le rapport.

La liberté de presse, qui fait des médias le quatrième pouvoir est bafouée. « Au Togo, il faut s’attendre à tout », avertit la LTDH qui indique que depuis sa naissance, elle a constaté plusieurs violations de la liberté de presse avec des menaces et destructions des biens meubles des organes de presse à l’époque (1993, Ndlr). « De 1990 jusqu’à 2005, année où le président Eyadema est mort, la presse est éprouvée par des chasses à l’homme, des incendies d’imprimeries, des kidnappings des directeurs de publication ou des rédacteurs par des agents des forces armées togolaises à la solde du régime au pouvoir. De 2005 à nos jours, la presse togolaise se retrouve de nouveau dans un dilemme. Les journalistes sont confrontés à l’équation : « quels types de journalistes sommes-nous ou voulons-nous être ? » et quelles institutions de régulation devons-nous avoir ? » », écrit la ligue.

Elle souligne que le pouvoir en place pousse parfois à l’autocensure et prive les médias jugés critiques de moyens (pression sur les opérateurs économiques pour ne pas leur donner des publicités et autres avantages par exemple). « Certains journalistes ou organes de presse ont été convoqués pour avoir écrit des articles politiques. D’autres ont fait l’objet de menaces ou de confiscation de matériels de travail sur les lieux de travail. Sur le terrain, les journalistes sont souvent pris à partie par les forces de sécurité et passés à tabac. Leurs appareils sont parfois confisqués. Aussi, les autorités portent-elles souvent plainte contre les journalistes qui se montrent critiques envers elles et ces derniers sont souvent sanctionnés par une justice partisane. De 2005 à 2019, trois radios et une télévision ont été fermées. L’aide à la presse est dérisoire et rend de ce fait un travail de qualité très compliqué pour tous les acteurs de la corporation. Les employés ne disposent pas, jusqu’à ce jour, d’une convention interprofessionnelle de la branche. On peut, en toute honnêteté, reconnaître que la législation qui encadre la création des médias, surtout écrits, est assez souple. Courant mars 2020, les organes de presse écrite tels, le quotidien « Liberté », « L’Alternative » et «Fraternité » ont été sanctionnés par la HAAC suite à une plainte de l’Ambassadeur de France au Togo. En somme, nous pouvons dire que la liberté de presse est une liberté en sursis ».

De la liberté d’association et de réunion, la LTDH déplore que malgré le cadre juridique togolais, la pratique révèle des violations répétées de ces libertés. « Depuis le 19 août 2017, les violations sont caractérisées par l’intrusion et la dispersion systématique des réunions des partis politiques de l’opposition ainsi que les interdictions de conférences de presse d’organisation de la Société Civile. Il s’est installé un délit d’appartenance à des partis politiques ou à des mouvements citoyens qui ne regardent pas dans le même sens que le pouvoir…Aujourd’hui, la délivrance des récépissés d’association n’est plus basée sur les critères de moralités, mais plutôt sur ceux basés sur l’appartenance politique », lit-on dans le rapport.

Relativement à la liberté de circulation, la LTDH soutient que la jouissance de cette liberté pose souvent problème pour des personnes qui sont dans le collimateur des autorités politiques à cause de leurs opinions politiques dissidentes. Et par rapport à la protection des femmes et des enfants ou mineurs, la ligue écrit : « La protection des femmes et des enfants relevant de droits catégoriels n’est pas reluisante. Les analyses et observations sur le terrain révèlent que les femmes continuent d’être victimes des hommes aussi bien dans leur foyer que dans la vie courante. Les jeunes filles sont traitées comme des objets et utilisées comme tels. En témoigne une vidéo du sieur Sodji balancée sur les réseaux sociaux et dont aucune suite judiciaire n’est connue jusqu’à cette date. La parité en genre dans les représentations politiques décidée par le chef de l’Etat n’a jamais été effective même au sein de son propre parti politique. Lors des manifestations politiques ces dernières années, plusieurs enfants ont été victimes de la barbarie des Forces Armées Togolaises et des milices proches du régime en place ».

Au volet de la vie démocratique du pays, le rapport a été consacré à l’analyse des contentieux électoraux, de la présence de l’armée et des enjeux de l’alternance. Selon la Ligue, même si depuis 2010, les élections au Togo n’ont pas débouché sur des violences, elles demeurent des périodes de crispation de la vie sociopolitique et sont souvent caractérisées par le cycle infernal élections-contestations-répressions-négociations. « Un passage en revue des processus électoraux qu’a connus le Togo depuis 1990 fait ressortir que le pays a connu six (06) élections présidentielles : (juin 1993, 21 juin 1998, en 2003, avril 2005, 4 mars 2010, 25 avril 2015), cinq (05) élections législatives (février 1994, en 2002, 14 octobre 2007, 25 juillet 2013, 20 décembre 2018), la première élection locale depuis 1987 a eu lieu le 30 juin 2019. Les institutions qui interviennent dans le processus électoral sont toutes à la solde du pouvoir et les conditions d’organisation des différentes élections portent en elles les germes des violences postélectorales. L’on peut affirmer que les élections au Togo ont été toutes régulières, mais n’ont jamais été sincères et transparentes. Plus de 53 ans au pouvoir, n’implique ni popularité ni légitimité », écrit la LTDH.

L’organisation de défense des droits de l’homme indique aussi que depuis 1963, l’armée togolaise continue d’influencer négativement le fonctionnement du système mis en place au Togo qui s’apparente à une dictature militaire. « Si la dictature perdure, c’est parce que l’armée occupe une place prépondérante dans le fonctionnement des institutions », martèle le rapport… L’armée ne cesse de s’opposer aux revendications du peuple pour l’alternance, et ce, au travers des nombreuses répressions des manifestations pacifiques du peuple. Même les enfants sont tués par des balles réelles. Dans l’optique de faire asseoir la terreur et la psychose au sein des populations, certains officiers sont nommés comme des autorités déconcentrées dans les préfectures. Les reproches formulés à l’encontre de l’armée se résument à son statut non républicain. De plus, sa prépondérance dans le fonctionnement des institutions est telle que les pouvoirs législatifs et judiciaires ont du mal à se dégager de son emprise », relève le rapport.

Dans ces conditions, l’alternance est hypothéquée. « La difficile démocratisation du Togo s’explique par le fait que notre pays demeure l’une des rares dictatures militaires qui sévissent encore dans une Afrique où les transitions démocratiques dessinent le contour du paysage politique. La dictature militaire instaurée par le clan Gnassingbé de père en fils, caricaturant la République en monarchie, se maintient par la terreur, l’impunité et la corruption contre la volonté du peuple togolais dans son immense majorité. Pour faire semblant d’être dans la norme démocratique, le régime militaire organise périodiquement des mascarades électorales dont les contestations sont souvent réprimées dans le sang avec tout le cortège de violations des droits humains : arrestations arbitraires, emprisonnements, tortures, violations des domiciles des opposants, instrumentalisation de la justice. Aucune institution n’est indépendante, car elles sont toutes inféodées au pouvoir exécutif. Surtout celles qui s’occupent des élections », déplore la LTDH qui parle d’une privatisation du Togo par une minorité qui pille le pays sans vergogne. « Cette minorité de civiles et de militaires a peur du changement à cause de la reddition de comptes qu’elle appréhende comme un cauchemar », explique le document.

Au chapitre des arrestations et détentions arbitraires et abusives, la Ligue rapporte que la torture et les peines ou traitements cruels, inhumains et dégradants ont librement cours au Togo. « La torture, cette pratique abjecte vis-à vis de la dignité humaine, s’est inscrite dans le mode opératoire des services de renseignement et des agents de sécurité… Il ressort de certains témoignages que des personnes, arrêtées et détenues ont été soumises à des simulacres d’exécution qui consistent à faire croire à l’exécution de la personne dont les yeux sont bandés, en lui demandant de faire sa prière ou de choisir entre Jésus, Satan ou Allah ».

La Ligue dénonce aussi le fait que depuis 2005, le régime en place utilise les arrestations politiques comme des prises d’otages. A chaque évènement politique, souligne-t-elle, le pouvoir utilise la justice et l’armée pour arrêter et envoyer en prison des citoyens qui expriment des points de vue contraires à ceux du régime.

Le constat de la LTDH dans le domaine de l’impunité et de la réconciliation est clair : « Depuis le 5 février 2005, date du coup d’État visant à placer au pouvoir Faure Gnassingbé et maintenir le régime en place, le peuple togolais vit dans une situation d’oppression… Les victimes de l’arbitraire, la classe politique togolaise et la société civile responsable s’accordent sur l’échec du processus de réconciliation et de la lutte contre l’impunité. Les auteurs des exactions de 2005, de 2012, de 2017 jusqu’à ce jour ne sont aucunement inquiétés ni par la justice locale ni par la justice internationale. Le peuple togolais s’estime abandonné au milieu d’une grande forêt remplie de prédateurs ».

Le droit à un procès équitable a toujours été en souffrance avec une justice instrumentalisée qui organise des procès expéditifs. « Malgré les nombreux projets financés par les partenaires techniques pour réformer le secteur, les juges ont toujours à leurs trousses, des hommes politiques du régime en place et des cadres de l’armée qui orientent très souvent les décisions rendues », déplore la Ligue.

Pour finir, elle dresse une liste de recommandations. A l’endroit du gouvernement et des institutions nationales :

faire cesser l’impunité des agents qui se rendent coupables d’actes de torture ;
rendre justice aux victimes de la torture ;
organiser le retrait de l’armée comme acteur politique majeur de la vie politique ;
abolir la loi liberticide restreignant la liberté de manifestation pacifique et sa jouissance ;
respecter les accords signés avec les forces démocratiques ;
libérer tous les détenus politiques ;
respecter la vérité des urnes ;
mettre fin au harcèlement politique et judiciaire des dirigeants de la Dynamique Monseigneur Kpodzro dont le candidat Messan Agbeyome Kodjo s’est proclamé vainqueur de l’élection présidentielle de février 2020.
A l’endroit de la communauté internationale :

manifester davantage son soutien à la lutte du peuple togolais pour l’avènement de la démocratie ;
exiger des enquêtes pour les cas de violations massives des droits de l’homme ;
veiller à la protection des défenseurs des droits humains ;
veiller au strict respect de la liberté d’expression et de presse ;
veiller à la protection des journalistes ;
cesser toute complicité dans l’organisation de mascarades électorales.
A l’endroit des organisations de défense des droits de l’homme :

réunir les forces et les moyens pour une meilleure défense des victimes des violations des droits humains ;
s’organiser pour les pressions et le lobbying afin de pousser l’Etat à respecter la Constitution, les droits des citoyens et la vérité des urnes.

G.A.

Source : Liberté Togo

 

 

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